La TaKetiK – Analyse de Arsenal v Manchester City (0-2)

Ce dimanche, Arsenal s’est incliné sur sa pelouse face à une équipe de Manchester City déjà très cohérente, solide et sûre de sa force. Une première décevante pour Unai Emery, mais qui nous apporte déjà des éléments de compréhension de la volonté de jeu du technicien espagnol.

La première du technicien espagnol dans l’antre des Gunners était attendue. C’est le moins que l’on puisse. Autant parce qu’elle était la première d’une nouvelle ère pour les rouge et blanc, que parce qu’elle nous permettait de découvrir l’application des principes d’Unai Emery face à l’un des meilleurs entraîneurs du monde, Pep Guardiola.

Les compositions

Sur le papier, deux 4-3-3 s’affrontent.

Côté Arsenal, deux recrues sont titulaires. Mais pas forcément celles qu’on attendait. A dire vrai, en défense centrale Sokratis Papastathopoulos accompagne Shkodran Mustafi, une paire de centraux qui était prévue. Mais c’est au milieu de terrain que Unai Emery surprend le plus en installant Matteo Guendouzi au cœur du jeu, aux côtés de Granit Xhaka et Aaron Ramsey. En attaque, Alexandre Lacazette est laissé sur le banc au profit d’un trio  composé de Henrikh Mkhitaryan, Mesut Özil et Pierre-Emerick Aubameyang. L’équipe est complétée par Hector Bellerin et Ainsley Maitland-Niles comme latéraux. Petr Cech – capitaine du jour comme l’avait prévu le Telegraph la veille – reste dans les buts malgré la présence de Bernd Leno.

Chez les Sky Blues, le mondialiste Kevin De Bruyne débute sur le banc, et David Silva est absent. Ce sont donc Bernardo Silva et Ilkay Gundogan qui accompagnent Fernandinho. Devant, la recrue Riyad Mahrez est titularisée aux côtés de Sergio Aguero et Raheem Sterling. En défense, aucune surprise: Benjamin Mendy, Aymeric Laporte, John Stones et Kyle Walker protègent Ederson.

La bataille du milieu de terrain annoncée n’aura pas eu lieu. Très vite, les Citizens ont douché les espoirs de Gunners bien trop friables.

L’intelligence fait toute la différence. Vous en doutiez ?

Les intentions d’Unai Emery et ses joueurs étaient claires et attendues. Profiter de l’adrénaline, tout en étant porté par le public – un public qui va petit à petit s’éteindre au fil de la rencontre – pour aller mettre une pression d’entrée sur les Citizens. C’est ce que les Gunners font. Mais plus que de simplement mettre la pression, les joueurs d’Emery gardent le ballon dans les quelques premières minutes du match. Très vite, la défense d’Arsenal joue haut et tente de sortir le ballon de derrière, en nombre.

Sur cette action, Arsenal compte 6 joueurs dans sa propre moitié de terrain et se retrouve clairement en supériorité numérique par rapport à Manchester City. Tour à tour, ce sont même Mesut Özil et Aaron Ramsey qui dézonnent et descendent bien plus bas pour apporter des appuis, des relais et tenter de déstabiliser le milieu de terrain des Skyblues. Arsenal fait tourner sans parvenir à faire bouger une défense de City bien sereine et qui remonte petit à petit obligeant Arsenal à jouer plus long. Après quelques secondes de jeu, les joueurs sont pris, les situations de passes courtes coupées.

Néanmoins, dans les premiers instants de la rencontre c’est City qui procède en contre notamment avec Kyle Walker et Riyad Mahrez qui entament leur travail de sape côté gauche. Les deux feront vivre un cauchemar à un Ainsley Maitland-Niles décevant jusqu’à sa sortie sur blessure.

Mais quand bien même, City n’a pas le ballon, son organisation pour gêner les premières relances d’Arsenal met à la peine des Gunners qui sont encore forcés à tenter des passes longues.

Sur cette nouvelle action, et même si Arsenal dispose de ses deux centraux, de Xhaka et de Guendouzi, la présence d’Aguero à gauche et Silva à droite empêche Xhaka de continuer à faire tourner le ballon vers ses défenseurs. De plus, trois milieux de terrain de City coupent les solutions intérieures que pourraient apporter Ramsey, Mkhitaryan ou Özil. Le milieu Suisse tentent alors d’alerter un Özil qui décide très justement de prendre la profondeur mais l’allemand est signalé hors-jeu.

Loins d’être assez précis techniquement, les Gunners n’arriveront pas à jouer leurs quelques situations avantageuses. Alors, c’est petit à petit que les joueurs de Guardiola vont mettre le pied sur le ballon. Ces phases de possession de balle nous ont alors permis de nous rendre compte de la volonté d’Emery de gêner les relances des Citizens dès le départ.

Emery avait décidé de profiter du volume de Ramsey pour le faire jouer très haut en phase défensive. Ainsi, Mkhitaryan gênait la relance de Kyle Walker, Aubameyang celle de Laporte et Ramsey avait le double rôle de gêner la relance Stones et de couper les lignes de passe vers Fernandinho. Ce qui est nettement visible ici est également que les trois attaquants d’Arsenal avaient pour mission de fermer le cœur du jeu pour forcer les Citizens à jouer sur les côtés. Mais malgré ces bonnes dispositions, l’intelligence des joueurs de Guardiola a permis de déjouer ce pressing. 

Dans la continuité de cette action, la défense de City monte d’un cran. Sans solution, c’est Gundogan qui redescend dans le dos de Mkhitaryan et apporte un relais à Kyle Walker. Il est trop tard pour que Mkhitaryan n’intervienne et Xhaka en retard, anticipe une passe de Walker vers Mahrez sur le côté droit de l’attaque bleue ciel. 

La balle arrive donc bel et bien vers un Mahrez qui se retrouve à pouvoir provoquer Maitland-Niles en un-contre-un. Un relai de Walker en débordement permettra à City de centrer devant le but sans que l’action ne donne rien par la suite. 

Cette volonté de bloquer les premières relances par l’axe, Arsenal l’a appliquée tout au long de cette rencontre avec plus ou moins de réussite.

Ce plan large nous permet de nous rendre compte des difficultés qu’ont rencontrées les Gunners à défendre sur les ailes. Ici, Arsenal défend en 4-3-3 laissant le milieu de terrain à Xhaka, Guenzoudi et Özil. Tout au long de la rencontre, l’Allemand a eu pour consigne de fermer à l’intérieur lorsque le ballon partait côté opposé, comme c’est le cas sur ce plan. City a répondu par un 3-4-3 sur phase offensive en demandant aux trois joueurs de devant de rester dans l’axe du terrain. Il en est résulté que si City n’a pas pu passer par le milieu de terrain, les mancuniens en ont profité pour demander au joueur de couloir gauche – souvent Sterling et parfois un Mendy qui, à la manière de David Alaba au Bayern, rentrait davantage dans l’axe du terrain – d’écarter au maximum pour vite renverser le jeu et profiter de l’espace laissé libre par un Hector Bellerin occupé à défendre sur des attaquants toujours plus axiaux. Occuper l’axe pour libérer un joueur de couloir, donc.

C’est ce schéma qui permet à Manchester City de marquer le premier but.

A la 14ème minute de jeu, Riyad Mahrez provoque une nouvelle fois côté droit. Benjamin Mendy qui accompagne cette offensive emmène Özil vers l’intérieur du jeu afin de libérer Raheem Sterling qui n’est absolument pas marqué par un Bellerin tourné vers le ballon et qui n’a aucune idée de ce qui se passe dans son dos. Mahrez va d’abord chercher Aguero dans la surface en profondeur puis le ballon arrive à Sterling suite à une passe d’un Mendy à la réception d’un centre renvoyé par la défense des Gunners. L’ailier anglais provoque, rentre sur son pied droit et enroule une frappe qui finit au fond des filets. Pas exempt de tout reproche, Petr Cech ne peut que constater les faits, City mène 1-0.

La différence entre un pressing réussi et un pressing raté

On l’a dit, l’intention d’Unai Emery face au City de Guardiola était d’être acteur de cette rencontre. De presser haut et en nombre pour profiter d’éventuelles récupérations hautes et d’attaques rapides vers l’avant. Ramsey devait être l’un des éléments essentiels de ce schéma qui aurait vu un PEA prendre rapidement la profondeur servi par le Gallois et Mikhy.

Malheureusement, la patience et l’intelligence des joueurs de City leur ont permis de se défaire du pressing rapidement et d’installer leur jeu. Pire, c’est la faculté des mancuniens à empêcher Arsenal de développer son jeu au sol depuis la défense qui leur a permis de neutraliser complètement leur adversaire en première période.

Ainsi, les rouge et blanc se sont retrouvés étouffés par un pressing dont ils n’ont réussi à se défaire.

Sur cette action, Arsenal tente de relancer au sol après un corner manqué de City. Sokratis est pris au marquage par Mahrez, Silva garde Xhaka. Guendouzi redescend pour apporter une solution mais se retrouve pris entre Sterling et Aguero. Guendouzi est forcé de jouer en retrait pour son gardien.

Le ballon mis en retrait sur Petr Cech, Aguero et Sterling déclenchent un pressing en même temps pour forcer le gardien à la faute, lui faire prendre des risques ou l’obliger à dégager en touche. Détail important à noter, le portier tchèque est sur son mauvais pied et ne peut donc ouvrir sur Sokratis ou Xhaka qui ne font néanmoins aucun effort pour se démarquer. 

Comme prévu, Cech est obligé de dégager de son pied droit. Mendy qui était monté très haut pour mettre la pression sur Bellerin et empêcher une relance par le côté droit d’Arsenal, bat le latéral espagnol au duel aérien et oblige Guendouzi à renvoyer le ballon dans l’axe sur un joueur de City.

Dans la continuité de l’action, le ballon se retrouve dans les pieds de Mustafi qui doit une nouvelle fois trouver une solution de relance. Le pressing de City est parfait et coupe toutes les possibilités de relance courte qu’elles soient dans l’axe, à droite ou même à gauche. Le défenseur allemand se retrouve dans l’obligation de jouer plus long et perd le ballon. Manchester reprend sa marche en avant. 

City enfonce le clou puis donne le marteau à des manchots

Arsenal finit mieux la première période, tentant de profiter des quelques espaces laissés par son adversaire. Si Bellerin avait une première fois frappé au but sans pour autant inquiéter Ederson à la 22ème minute. Aubameyang tente également sa chance en fin de première période. A dire vrai, les 10 dernières minutes de la première mi-temps permettent à Arsenal de mettre davantage le pied sur le ballon et de tenter de développer du jeu. Lichtsteiner entré en jeu pour suppléer un Maitland-Niles blessé, les Gunners subissent moins les assauts répétés de Mahrez sur son côté gauche. Mieux encore la défense récupère plus de ballons et profite des projections en nombre de l’attaque de City pour contrer leurs adversaires. Mais malgré ces situations, Arsenal reste extrêmement approximatif et conserve un déchet technique trop important dans le dernier geste. En témoignent les trop faibles pourcentages de réussite de passe des 4 joueurs offensifs du jour, autour de 70% en moyenne, et les pertes de balle de Mkhitaryan, Özil et Ramsey dans les 25 derniers mètres.

La seconde période commence comme s’était terminée la première. Un City qui gère davantage et laisse un peu plus venir. Mais toujours autant d’imprécisions de la part des rouge et blancs. Dès la 53ème minute, Unai décide de faire un changement et de faire sortir un Ramsey en manque de jambes. Alexandre Lacazette le remplace et Arsenal passe en 4-2-3-1 avec un Mesut Özil recentré, PEA décalé sur la gauche et Mikhy décalé à droite. Mais si on change d’hommes, la tactique défensive reste la même. Dans cette volonté de pressing, Özil accompagne le français et le Gabonais pour gêner les premières relances.

Arsenal profite notamment de possibilités en contre, mais ne parvient pas à concrétiser ce regain de forme. A titre d’exemple, à la 48ème minute, Mesut Özil mène un contre suite à un corner de Manchester City. Pourtant en 3 contre 3 avec PEA en quatrième soutien, l’Allemand perd le ballon et l’action ne va pas au bout.

Un changement est particulièrement notable pour les Gunners. Le pressing moins dense de City permet à Arsenal de profiter d’espaces pour sortir le ballon.

City est en place, en partie. Xhaka est libre de tout marquage et si Bernardo Silva oblige Lichtsteiner à jouer derrière où De Bruyne peut aller presser Sokratis, le fait que le suisse soit droitier lui permet de trouver Xhaka au milieu et annihiler le pressing de City. 

Libre de tout marquage, Xhaka a le temps d’orienter le jeu vers la droite. Le suisse joue long vers Bellerin. Dans la continuité de l’action, Lichtsteiner poursuit son effort et se retrouve dans la surface mais un échange entre Xhaka et Özil met fin à l’action, l’allemand étant signalé hors-jeu. 

City refroidit l’Emirates une bonne fois pour toutes à la 63ème minute. Présent en attaque sur le côté droit de la défense de City, Arsenal perd le ballon et est très vite dépassé. Ilkay Gundogan sort le ballon et transmet à Mendy. Suite à un échange avec Sterling, Mendy déborde et centre en retrait pour un Bernardo Silva qui place une frappe dans la lucarne droite de Peter Cech.

A 2-0, le match est définitivement plié. Pourtant, jusqu’à la fin de la rencontre, City va commettre des erreurs qu’il n’avait pas commis jusque-là. Des erreurs dans la relance qui permettent aux joueurs d’Emery de récupérer le ballon proche des buts adverses mais la fatigue et des approximations impardonnables à ce niveau font gonfler le déchet technique de Gunners qui ne savent pas revenir dans la partie.

Conclusion

La première d’Emery en Premier League est manquée. Mais le technicien espagnol concède une défaite face au principal candidat à sa propre succession.

Malgré tout, des enseignements sont à tirer de cette rencontre. Il est assez clair et net de voir le travail effectué par Emery et son staff pour inculquer une mentalité, une philosophie et une envie d’aller de l’avant à ses joueurs. La volonté d’embêter les Citizens était présente et le tactique proposée n’était pas attentiste. Emery n’a nullement eu l’intention de regarder son adversaire jouer et de repartir en contre de très bas.

Et, au-delà des enseignements purement tactiques, des questions ont été soulevées relativement aux joueurs. Il apparait aujourd’hui compliqué de se priver d’un Alexandre Lacazette essentiel offensivement et bien plus complet que son compère d’attaque PEA, mauvais aujourd’hui. Des questions sur la faculté de Cech à permettre à Arsenal de pratiquer ce jeu court depuis sa moitié de terrain se posent même si ce dernier nous a gratifié de quelques arrêts de grande classe notamment face à Aguero. Enfin, l’impossibilité pour Xhaka de résister à une équipe qui pratique un pressing haut laisse penser que Lucas Torreira entré en jeu en seconde période pourrait bel et bien lui prendre sa place.

Rendez-vous face à Chelsea, samedi à 18h30 (hf), pour découvrir quel nouveau dispositif nous réserve Emery et son staff.

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